Pokémon et écriture inclusive

Dans cette newsletter, oui on parle Pokémon mais surtout je vous propose une matrice pour mieux vous repérer dans la jungle des outils du langage inclusif et faire des choix stratégiques. J'analyse 7 exemples d'écriture inclusive. J'annonce les prochaines dates de formation. Et en bonus : 3 reco culturelles totalement mind-blowing.

re·wor·l·ding
5 min ⋅ 21/03/2025

« Comment écrire en écriture inclusive » : quand on fait cette recherche sur Internet, on tombe sur de nombreux articles qui détaillent les règles de l’écriture inclusive (moi, je préfère parler de conventions), listent les outils disponibles et proposent des exemples d’écriture inclusive, souvent de simples phrases qui passent du masculin dit générique à une version avec point médian ou mots épicènes.

Tout cela est très bien (et nécessaire) mais il manque souvent à ces articles une vue plus holistique des différentes techniques du langage inclusif (formulation que je préfère à écriture inclusive) qui permette de mieux comprendre les différences entre ces outils et de faire des choix stratégiques.

Cette matrice, je l’ai créée pour vous (avec l’aide de mon fils de 11 ans, vous allez comprendre).

Écriture inclusive : comment faire ?

Commencer par ranger sa boîte à outil

Je dis souvent que le langage inclusif, c’est comme une boîte à outils.

Quand on veut construire une table, on n’utilise pas qu’un marteau. On utilise aussi une scie, un tournevis, et j’en passe.

Pour créer un texte ou un discours en inclusif, c’est pareil : on n’utilise pas qu’une seul outil, comme la ponctuation ou les doublets.

Utiliser les bons outils permet d’avoir une table jolie et stable. De même, utiliser la palette des outils du langage inclusif permet d’obtenir un texte agréable à lire et efficace.

Mais tous les outils ne produisent pas les mêmes effets.

Alors comment les choisir ?

Les questions à se poser quand on écrit en inclusif

Il faut partir du contexte dans lequel le texte sera reçu : on ne va pas s’exprimer de la même manière dans un email à sa famille ou une présentation pour des client·es.

Il est alors utile de se poser ces 2 questions :

  • Quelle est mon audience ?
    Est-ce que les gens à qui je m’adresse ont l’habitude de voir des textes en inclusif ou pas ?
    Est-ce un groupe militant ou une audience dont je ne connais pas du tout les valeurs ?

  • Quel est mon objectif ?
    Je ne veux pas exclure les femmes en choisissant des formulations qui neutralisent ou je veux leur donner encore plus de visibilité ?

Répondre à ces questions permet de choisir l’outil le plus pertinent dans un contexte donné et de varier d’utilisation en fonction de :

  • son objectif de visibilisation des femmes : neutraliser, égaliser, visibiliser, réinventer.

    Parce qu’on sait que toutes les formes de langage inclusif n’ont pas la même efficacité pour créer des représentations mentales féminines (par exemple, les épicènes sont moins efficaces que les doublets)

La matrice Evoli, d’évaluation des outils du langage inclusif

Pour vous aider à vous repérer, j’ai créé un outil d’aide à la décision.

C’est une matrice d’évaluation des outils du langage inclusif. Ou Evoli.

Comme le Pokémon Evoli qui a la capacité d’évoluer vers tous les types de Pokémon en fonction de son environnement (vous comprenez pourquoi j’ai demandé de l’aide à mon fils, maintenant ?).

Cette matrice classe les principaux outils du langage inclusif sur 2 axes :

  • leur efficacité pour créer des représentations mentales féminines

  • leur adhésion ou résistance anticipée en fonction de leur caractère plus ou moins identifiable comme étant des outils du langage inclusif.

Sur cette matrice, vous voyez comment se positionne chaque outil du langage inclusif.

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re·wor·l·ding

Par Alicia Birr

Un des éléments fondamentaux pour cultiver son regard critique sur les mots est de toujours avoir en tête où se situe celle ou celui qui écrit : notre âge, notre genre, notre passé, notre présent, nos conditions de vie influencent évidemment ce que nous ressentons, pensons et comment nous l’exprimons avec des mots (si même on parvient à l’exprimer, soit parce que l’on manque des mots pour le faire ou que l’on n’a pas d’espace où rendre publics, visibles ces mots).

Aussi, il me semble inconcevable de contribuer à cette vaste entreprise d’éducation par la déconstruction du langage sans dire où moi, je me situe.
Je suis une femme blanche, cisgenre, hétérosexuelle, en couple, mariée, mère de trois enfants, dans ma quarantaine, vivant à Paris, doublement diplômée dans des cursus dits prestigieux, ancienne cadre dans une entreprise multinationale, aujourd’hui indépendante, je suis privilégiée.
Je suis une femme qui a été témoin de violences sexistes depuis son enfance, qui a été harcelée, qu’un homme a tenté d’agresser dans le métro sans que personne n’intervienne, qu’on a traitée de conne en réunion, qui a subi des violences obstétricales.
Je suis une femme féministe, qui a milité dans une association LGBTQI+, qui a été hôtesse d’accueil à la Défense, qui a créé, dirigé puis fermé son entreprise, qui adore l’école, qui aime beaucoup parler en public et former les gens, qui coache d’autres femmes.

Récemment, j’ai réfléchi à la notion de syndrome d’imposture et j’ai décidé de bannir cette expression de mon vocabulaire. Il y a plein de raisons que je pourrais invoquer pour délégitimer ma position : que je ne suis pas linguiste ou que je n’ai jamais été créa dans une agence de com. Mais il y a quelques temps j’ai entendu Aurélien Barrau, astrophysicien et philosophe, parler de sa propre légitimité à s’exprimer sur les questions écologiques, dont il n’est a priori pas expert sur le papier. Aux critiques qui cherchent à déligitimer son discours, donc, il répond simplement : “Mais je m’en fous, je sais que ce que je dis est intéressant”. Et j’ai décidé que pour moi, c’est pareil.

J’ai même envie de dire que c’est parce que je ne suis pas linguiste que ce que j’écris est intéressant : parce que c’est ancré dans le concret de mon quotidien, parce que c’est dit avec des mots accessibles (en tout cas, j’espère). Et que c’est nourri par mes expériences personnelles et professionnelles : j’ai travaillé dans la musique, dans la mode, dans les médias, chez Google, en tant que coach, productrice évènementielle, j’ai travaillé avec des bouts de ficelles et des moyens dispendieux, je suis retournée deux fois me former pour compléter ma formation initiale en sciences politiques.

Aujourd’hui, tout ça s’articule, les points se relient, et je donne du sens à mon parcours sur le vaste terrain de jeu du langage inclusif avec re·wor·l·ding, qui se veut à la fois un espace pédagogique de création de contenu accessible à toutes et à tous, et un véhicule pour faire de la formation et du conseil en communication inclusive dans les entreprises, ainsi que du coaching en management et leadership inclusif.

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